Anonymous, c’est l’histoire d’un groupe de hackers adepte du trolling au milieu des années 2000. Les membres étaient des usagers du forum 4chan. L’identité et le projet collectif du groupe prennent forme sur ce site. La culture de l’anonymat devient une signature d’Anonymous, un groupe hostile à toutes formes de leaderships. Il devient aussitôt un acteur majeur de l’activisme sur internet. Face à l’ampleur de ses actions, il a même fait l’objet d’une étude par l’anthropologue Gabriella Coleman. Son ouvrage est considéré à ce jour comme le plus complet et le plus rigoureux sur Anonymous.
Anonymous est un mouvement de cyberactivisme le plus connu au monde. Ils ont fait du masque de Guy Fawkes, l’homme qui a tenté d’assassiner le roi d’Angleterre au XVIIᵉ siècle, leur emblème. Le groupe se fait connaître en 2008 suite à l’attaque de l’église de la scientologie. Il est également proche des organisations telles que Black Lives Matter et défendait Wikileaks. Parmi ses cibles les plus connues, on retrouve des entreprises comme Paypal et Mastercard et des organisations comme le Klu Klux Klan et l’Etat islamique.
Anonymous : un mouvement décentralisé
Le mouvement Anonymous apparaît pour la première fois sur la plateforme 4chan en 2003. Il s’agit d’un forum de partage d’images de manière anonyme. Au départ, les membres sont adeptes du trolling, une pratique visant à se moquer ou à salir la réputation d’une personne.
Caché derrière l’anonymat, les membres souscrivent ensuite à des actes militants, soutenant des causes comme la lutte contre les injustices et la liberté d’expression. Il s’agit d’un mouvement décentralisé qui ne possède pas une hiérarchie structurée. La plupart des actes proviennent d’initiatives individuelles signées Anonymous.
Il suffit d’un masque et d’un logo, ajouter la maxime du mouvement « Nous sommes les Anonymous, nous sommes légion, nous ne pardonnons pas, nous n’oublions pas, comptez sur nous ». Cette décentralisation entretient le flou quant à leurs véritables objectifs.
Le groupe de hackers a fait de l’attaque DDoS (attaque distribuée par déni de service), sa marque de fabrique. Cela consiste à inonder un site web ou un service de requêtes pour mettre les serveurs hors services. Ils sont également adeptes du doxing, c’est-à-dire dévoiler publiquement des données confidentielles d’une personnalité ou d’une organisation.
La première apparition dans le jeu Habbo Hotel
Habbo Hotel est un jeu en ligne populaire au milieu des années 2000. Le concept est simple : les joueurs choisissent un avatar et forment une communauté en interagissant avec d’autres. Des rumeurs commencent à circuler sur des modérateurs racistes qui bannissent les avatars noirs.
La communauté qui comptait plusieurs membres d’Anonymous lance alors leur premier mouvement de contestation. Les utilisateurs adoptent un avatar noir et se réunissent autour d’une piscine dans le jeu. En 2006, le groupe d’hacktivistes déclare le jeu vidéo comme « raciste ».
Dans la même année, un parc d’attractions aux États-Unis a interdit la piscine à un enfant séropositif. Les Anonymous s’emparent de l’histoire. Des manifestants se sont tenus devant la piscine pour contester cette décision.
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L’attaque de l'Église de scientologie : l’acte fondateur des Anonymous
L’Église de scientologie constitue la première cible majeure du mouvement. Tout commence par une vidéo de prosélytisme qui a fuité de l’église. On y voit l’acteur Tom Cruise glorifier cette religion. Les avocats interviennent aussitôt, sommant les sites qui ont partagé la vidéo de la retirer. Ce retrait a été perçu comme une censure par certains membres d’Anonymous.
En 2008, le projet « chanology » est lancé pour dénoncer cette tentative de censure initiée par les instances de scientologie. Bilan de l’opération : plusieurs sites de l’église ont subi des attaques DDos. À cela s’ajoutent des manifestations physiques, une première pour le groupe d’hacktivistes. C’est à cette époque que l’on voit le masque de Guy Fawkes pour la première fois. Les manifestants étaient appelés à porter ce masque pour éviter les représailles de la scientologie.
Vendetta contre la Russie suite à l’invasion de l’Ukraine
En 2022, le groupe est sensible à la guerre en Ukraine. Pour dénoncer cette invasion, il lance plusieurs cyberattaques visant la Russie. Parmi les cibles, on retrouve des médias publics russes, Roscosmos (l’agence spatiale russe), Rosatom (société nationale d’énergie atomique), agences gouvernementales, grandes banques, etc. Au total, plus de 2500 entités russes ont été visées.
Leurs attaques successives ont permis de dérober des gigaoctets de données, comme ce fut le cas sur le site de Rosatom. Plus de 446 Go de données du ministère de la culture russe sont dévoilés publiquement.
Les autres opérations connues d’Anonymous
Voici une liste des opérations également attribuées au mouvement Anonymous :
- Opération payback : Pour manifester son soutien à Wikileaks, le groupe lance des attaques DDoS contre PayPal, MasterCard et Visa.
- Opération Charlie Hebdo : En soutien au journal français, Anonymous perturbe la communication sur les sites de groupes extrémistes.
- Opération Darknet : Le mouvement dirige une vaste opération visant les sites pédopornographiques sur le darkweb.
- Soutien à Hong Kong : Anonymous lance plusieurs attaques contre des sites gouvernementaux chinois pour soutenir les manifestants à Hong Kong en 2019.
- Soutien aux réfugiés en Australie : 82 Go de données dérobées pour dénoncer la pratique des autorités australiennes sur l’île de Nauru, un endroit pour mettre en détention des demandeurs d’asiles et des réfugiés clandestins.
Des justiciers du web ou des cybercriminels ?
L’opinion publique sur les actions des Anonymous est mitigée. Si certains les considèrent comme les cybercombattants de la liberté, cet avis n’est pas partagé par tout le monde, notamment les forces de l’ordre. Leurs méthodes comme les attaques DDoS et le doxing sont considérées comme illégales par les autorités.
Ces dernières mettent également en évidence les conséquences imprévues de leurs actes. En effet, le doxing peut exposer les données d’innocents individus. En 2014, le groupe a révélé le nom du policier dans l’affaire Ferguson aux États-Unis. L’information qui était erronée a entaché la réputation de cette personne.
La nature décentralisée du groupe suscite aussi les débats. En l’absence d’un agenda politique clair et d’un commandement central, un individu peut agir sous le nom d’Anonymous sans penser aux conséquences.
Les hacktivistes se sont attaqués aux comptes twitter de plusieurs membres de Daech, l’organisation terroriste. Ils attirent aussitôt la foudre des agences gouvernementales qui avaient besoin de ces comptes pour espionner les djihadistes.